L'Humanité comme Sujet du Droit International

AutorAntônio Augusto Cançado Trindade
Ocupação do AutorJuiz da Corte Internacional de Justiça (Haia)
Páginas292-310
XIII
L´Humanité comme Sujet du Droit International
Résu: I. Remarques Préliminaires. II. La Prise de Conscience des Intérêt s Com-
muns et Supérieurs de l’Humanité en tant que Telle. III. La Reconnaissance du
Principe Fondamental d’Humanité. IV. Le Principe d’Humanité dans l’Ensemble
du Corpus Juris de la Protec tion Internationale de l’Individu. V. Le Principe d’Hu-
manité dans l’Héritage de la Philosophie du Droit Naturel. V I. L’Humanité et les
Considérations d’Humanité: Une Précision d’Ordre Conceptuel. VII. L’Émergence
de l’Humanité en tant que Sujet de Droit International. VII I. Vers la Réalisation
de l´Idéal de la Justice Univer selle. IX. Conséquences Juridiques de la Reconnais-
sance de l’Humanité en tant que Sujet de Droit International. 1. Applicabilité du
Cadre des Droits de l’Homme. 2. La Question d e la Capacité d´Agir et de la Re-
présentation Légale.
I. Remarques Préliminaires
Il y a déjà quelques années que j´accorde une attention particulière à la condi-
tion de l´humanité en tant que sujet de droit international. Ainsi, dans mon Cours
Général de Droit International Public, délivré à l´Académie de Droit International de
La Haye en 2005, j´ai consacré tout un chapitre à cette question1. À l´heure où nous
entrons dans la deuxième décennie du XXIème siècle, – et où nous commémorons
120 années de l´existence de la Faculté de Droit de l´Université Fédérale de Minas
Gerais au Brésil, – il me semble opportun de reprendre les réflexions sur ce sujet, à
mon avis de grande importance por le présent et le futur du droit international. Tout
d´abord, soutenir, comme je le fais, que l´humanité est un sujet de droit internatio-
nal, ne signifie pas, en aucun cas, suggérer qu´elle se substituerait aux États.
Il faut, alors, commencer par une précision préliminaire. En l’état actuel du
droit international, les Etats n’ont plus l’apanage de cette qualité de sujet de droit
international; ils la partagent à présent avec les organisations internationales et les
individus ou groupes d’individus. En outre, l’humanité elle-même, à mon avis, a
1 E.g., dans mon Cours Général de Droit International Public, délivré en 2005 à
Académie de Droit International de La Haye; cf. A. A. Cançado Trindade, «International
Law for Humankind: Towards a New Jus Gentium – General Course on Public International
Law – Part I», 316 Recueil des Cours de l’Académie de Droit International de la Haye [RCADI]
(2005) ch. XI, pp. 318-333.
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A HUMANIZAÇÃO DO DIREITO INTERNACIONAL
accédé au statut de sujet de droit international. Ainsi coexiste-t-elle avec les Etats,
sans se substituer à eux; réciproquement, les Etats ne peuvent plus considérer que le
droit international est au service de leurs propres intérêts et d’eux seuls. De fait, la
volonté de servir les intérêts des Etats influe sur l’efficacité du droit international;
mais les intérêts de tel ou tel Etat ne sauraient l’emporter sur ceux, généraux et supé-
rieurs, de la communauté internationale dans les domaines qui la touchent directe-
ment (comme le désarmement, les droits de l’homme, protection de l’environne-
ment, et l’éradication de la pauvreté, pour ne citer que ceux-là)2.
II. La Prise de Conscience des Intérêts Communs et Supérieurs
de l’Humanité en tant que Telle
L’expérience a montré que c’est lorsque les Etats et autres sujets de droit inter-
national ont bien considéré et fait prévaloir ces intérêts généraux que le droit inter-
national a pu progresser. On ne saurait nier que les avancées que le droit internatio-
nal a connues au cours des dernières décennies sont attr ibuables à la reconnaissance
et à la consécration des intérêts généraux et supérieurs de l’humanité (dans des do-
maines comme le droit international des droits de l’homme, le droit international de
l’environnement, le droit de la mer ou le droit de l’espace extérieur). Les Etats
eux-mêmes ont contribué à ces progrès, chaque fois qu’ils ont fait passer les considé-
rations élémentaires d’humanité et les intérêts généraux de l’ensemble de la commu-
nauté internationale avant leurs propres intérêts.
D’ailleurs, le but ultime du jus cogens consiste précisément à garantir la pri-
mauté des intérêts et des valeurs les plus fondamentales de la communauté interna-
tionale dans son ensemble. L’interdiction absolue qui pèse sur les violations graves
des droits de l’homme indique, par exemple, comme M. Lachs l’a rappelé, que
«l’humanité, ou la communauté internationale, au fil de l’histoire, a estimé nécessaire
de proscrire, une fois pour toutes, certains ac tes (…). Même les contestataires et les dubita-
tifs sont forcés de l’admettre, s’ils acceptent les prémisses élémentaires du droit et l’impé-
rieuse nécessité de le faire évoluer»
3
.
Il est, en fait, certaines obligations internationales qui touchent à la sauvegarde
des valeurs fondamentales de la communauté internationale elle-même et qui sont
distinctes des autres obligations internationales, d’où l’émergence de concepts tels que
les obligations erga omnes, découlant du jus coge ns, en droit international moderne4.
2 A. A. Cançado Trindade, O Direito Internacional em um Mundo em Transformação,
Rio de Janeiro, Ed. Renovar, 2002, pp. 1068, 1083 et 1094-1095.
3 M. Lachs, «The Development and General Trends of International Law in Our
Time», 169 RCADI (1980) p. 205.
4 La conception classique n’admettant qu’un régime unique et uniforme de
responsabilité internationale ne correspond plus à l’état actuel de la question en droit
international moderne: V. Starace, «La responsabilité résultant de la violation des
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